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La tête dans la Lune

28 juin 2021

« En réalité, rien n’est figé. C’est tout cela qui devient passionnant. » Laura Paccot

Noémie graff, du domaine le Satyre, à Begnins, nous parle de la biodynamie et de l’influence de la lune dans le travail à la vigne

Quand la vigne a rendez-vous avec la Lune, cela donne des vins subtils, fruités ou floraux. Encore faut-il suivre les rythmes cosmiques de cet astre, tout en restant créatif. Exercice difficile, surtout quand les caprices de la météo y mettent leur grain de sable. La biodynamie, c’est un véritable art, qui demande une connaissance profonde de la nature, et une attention particulière à la plante pour qu’elle puisse s’épanouir. Plus qu’une méthode, c’est une vraie philosophie.

«On cite forcément Rudolf Steiner, créateur de la biodynamie, précise Noémie Graff, vigneronne et fine connaisseuse en matière de mythologie. En fait, il est intervenu dans les années 1920 auprès d’agriculteurs anthroposophes qui constataient les ravages des premiers engrais chimiques. S’appuyant sur des millénaires de traditions agricoles, il a trouvé des solutions. Son idée est de capter les forces cosmiques de la Terre et du ciel pour trouver un équilibre dans la culture.»

Sous les traits de Séléné
Pour cela, le calendrier de Maria Thun, pionnière du jardinage biodynamique, est un outil indispensable. Les phases de la Lune y sont décrites de manière précise. «On va par exemple choisir une Lune montante pour planter une jeune vigne, car la sève descend et l’activité va se faire dans le sol.»

On relève aussi qu’il existe des jours feuilles, fleurs, fruits et racines. «C’est la place de la Lune par rapport aux constellations qui détermine ces jours-ci, reprend Noémie Graff. Si la Lune est devant une constellation dite eau (Cancer, Poisson, Scorpion), cela favorisera l’activité des feuilles. Devant une constellation d’air (Gémeaux, Balance, Verseau), les fleurs. Au moment de la vendange, pour obtenir un beau gewurztraminer, on choisira de préférence un «jour fleur». Mais tout est vite remis en question si le terrain est trop sec ou trop mouillé. En fait, tout est question d’adaptation. »

La tête dans les étoiles, la vigneronne regarde le ciel. «C’est étrange car la Lune est plutôt personnifiée comme un dieu masculin, à l’exception de la mythologie gréco-romaine où elle se présente sous les traits de Séléné.» Un symbole d’apogée et de maturité. De quoi faire des vins d’excellence.

Laura Paccot: «La Lune, c’est la cerise sur le gâteau»
«On s’appuie beaucoup sur les calendriers lunaires, celui de Maria Thun en particulier. Le principe de la biodynamie, c’est que la plante ne peut pas se déplacer, contrairement à nous. De ce fait, elle est beaucoup plus sensible au rythme du jour et de tout ce qui l’entoure. Il faut donc la respecter et s’en occuper. La biodynamie est un outil très important qu’il ne faut pas utiliser comme un guide trop rigide, car il y a beaucoup d’autres paramètres qui entrent en ligne de compte, comme la météo. La Lune, c’est la cerise sur le gâteau. À la cave, par exemple, on essaie de ne pas faire de mise en bouteilles pendant les nœuds lunaires. Il y a aussi les cycles du soleil. Par exemple pour la taille, on attend le solstice d’hiver car la sève retourne vers l’extérieur. Et surtout, on le fait un jour sans pluie. En réalité, rien n’est figé. C’est tout cela qui devient passionnant.»
Domaine La Colombe, Féchy (VD). lacolombe.ch

Catherine Cruchon: «Les nœuds lunaires, pause des vignerons»
«L’impact de la Lune, du soleil et des constellations est immense sur le végétal. Le concept de la biodynamie est de s’adapter à la plante. Travailler avec le calendrier lunaire, c’est travailler avec son rythme à elle. La chimie classique veut que l’on utilise un produit pour tuer la maladie. La biodynamie essaie de comprendre ce qui ne va pas et de trouver un équilibre. Le calendrier lunaire est l’un des outils. Si on regarde les planètes de notre système, elles sont toutes sur le même plan de l’écliptique. La Lune est la seule qui est désaxée. Elle va donc relayer les énergies. Or, deux fois par mois, elle se trouve à la même hauteur que les autres planètes. On appelle cela les nœuds lunaires. Ces jours, on ne va pas faire d’action sur la vigne, ni tailler, ni vendanger, ni mettre en bouteilles. Après, tout est question d’intuition. Avec la nature, il faut toujours avoir le bon sens paysan.»
Domaine Henri Cruchon, Echichens (VD). henricruchon.com

Valentina Andrei: «Comme l’horoscope, on en retient le meilleur»
«On parle beaucoup de la Lune, mais en ce moment la végétation est souriante et nous sommes dans des périodes de chaleur. Pour moi, le cycle du Soleil est plus important que celui de la Lune. Si on regarde les saisons, la vigne réagit
à la puissance du soleil, que ce soit au printemps quand tout démarre, ou en été avec la photosynthèse. Les préparations biodynamiques, que ce soit la bouse de corne ou la silice, se posent en fonction du cycle du soleil, le matin ou le soir, jamais à midi. Concernant le calendrier lunaire, je suis proche de Maria Thun. Elle me rappelle comment travaillait ma grand-mère. Mais le calendrier, c’est un peu comme lorsqu’on lit notre horoscope, on en retient le meilleur. Si on l’applique à la lettre, cela devient très compliqué. C’est comme avec un bébé, on vous dit quoi faire, mais c’est vous qui allez trouver les solutions. Il faut rester créatif, attentif. Pour moi, la biodynamie, c’est avoir une bonne énergie avec son équipe. Et ça se sentira dans le vin.»
Valentina Andrei, Saillon (VS). valentinaandrei.ch

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